Le 24 novembre 2006, la mort lente et étrange à Londres de l'ex-agent Alexandre Litvinenko réveille le fantôme des méthodes d'élimination des services secrets russes: c'est le point de départ d'une enquête passionnante coproduite par Arte et l'agence Capa. Pour ce documentaire "Meurtres en série au pays de Poutine", diffusé ce soir sur ARTE à 21h00, réalisé avec Philippe Lagnier, Manon Loizeau, reporter à Capa, a suivi pendant presque un an Andreï Lougovoï, principal suspect dans le meurtre de Litvinenko. Les images de Litvinenko agonisant sur son lit d'hôpital à Londres, après avoir été empoisonné au polonium 210, ont fait le tour du monde. Manon Loizeau a vécu pendant huit ans en Russie, entre 1994 et 2002, et y a conservé beaucoup de relations. Elle explique avoir rencontré Lougovoï, ex-officier du KGB qui a créé une entreprise de sécurité, par l'intermédiaire d'un ami journaliste. "Il est très bon pour faire ses propres relations publiques", dit-elle aujourd'hui. "Je lui ai demandé s'il était responsable du meurtre de Litvinenko. Il ne m'a pas regardée dans les yeux. Je lui ai reposé la question plusieurs fois, notamment en fin de tournage dans l'hélicoptère en Sibérie, il a eu un moment de flottement", se souvient-elle. Au fil de son enquête, Manon Loizeau évoque comment tous ceux ayant enquêté sur la part d'ombre de l'arrivée au pouvoir de Poutine et la corruption au sein du FSB (l'ex-KGB) ont été menacés, emprisonnés voire assassinés. Elle revient notamment sur le sort d'Anna Politkovskaïa, assassinée à un mois d'intervalle avec Litvinenko, en octobre 2006. Elle obtient les témoignages de l'épouse de Litvinenko, de Boris Berezovski, oligarque réfugié à Londres, de Garry Kasparov leader de l'opposition vite muselé. Et suit Lougovoï partout, chez lui et même au sauna. Elle recueille aussi le témoignage exclusif d'un ex-colonel du FSB Mikhaïl Trepachkine. Il a fait quatre ans de prison pour avoir affirmé que les services secrets russes étaient impliqués dans les attentats de 1999, qui ont conduit Poutine à relancer la guerre en Tchéchénie avant de succéder à Boris Eltsine. "Je ne sais pas combien de temps il va rester en vie. mais, en même temps, le fait de s'exprimer le plus possible est son assurance vie", dit-elle. Au cours de son enquête la journaliste reconnaît avoir "été un peu suivie". "Pour rencontrer les gens, on ne donne plus de nom au téléphone, on se rencontre dehors et pas dans une salle. En quelques années, le rouleau compresseur s'est accéléré", juge-t-elle. En décembre dernier, Andreï Lougovoï a été élu député.
Rédaction
26 février 2008
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