Grande figure des médias, Jesus de Polanco, décédé samedi à l'âge de 77 ans, avait réussi à créer en une trentaine d'années le premier groupe de communication espagnol, Prisa, en s'appuyant sur son titre phare, le quotidien de centre gauche El Pais. Farouche défenseur de la démocratie, de sensibilité socialiste, Polanco avait donné un nouveau souffle à la presse espagnole, après de longues années de dictature franquiste (1939-75), en finançant le lancement en 1976 d'El Pais, devenu le premier quotidien espagnol. Il avait ensuite progressivement développé Prisa, un empire de presse hispanique, présent tant en Espagne qu'en Amérique Latine, dont il était l'actionnaire majoritaire et dont le chiffre d'affaires annuel approche les 3 milliards d'euros. Né le 7 novembre 1929 à Madrid, orphelin assez jeune, Jesus de Polanco Gutierrez a financé ses études de droit en vendant des livres, avant de créer en 1958 la maison d'édition Santillana. Il rejoint ensuite le groupe fondateur d'El Pais et participe au financement et au lancement en mai 1976 du nouveau quotidien de la période de "transition" démocratique dirigé par Juan Luis Cebrian, assurant la première paye de la rédaction sur ses fonds propres. Personnalité charismatique et homme d'influence, Polanco installe ensuite progressivement Prisa, propriétaire d'El Pais, et dont il détenait 64 % du capital, au sommet des groupes espagnols de communication. Largement soutenu par le gouvernement socialiste de Felipe Gonzales, il a du ensuite batailler ferme, y compris dans les tribunaux, à la fin des années 1990 contre le gouvernement conservateur de José Maria Aznar, qui voulait limiter ses projets d'expansion, notamment dans le câble et la télévision. Polanco, qui n'avait pas la langue dans sa poche, avait de nouveau affronté la droite en mars dernier, en assimilant certains prises de position du Parti Populaire d'opposition (PP) à du "franquisme pur et dur". Le PP avait réagi en boycottant les publications du groupe pendant plusieurs semaines. "C'était un grand défenseur des libertés et de la démocratie", a rappelé samedi le président socialiste de la région de Catalogne, José Montilla. Ses critiques l'ont en revanche parfois accusé d'être le "bras médiatique" du Parti socialiste au pouvoir (PSOE). Très cultivé, grand promoteur de la langue espagnole, Polanco, était aussi extrêmement riche. Il venait au 11e rang en Espagne, avec une fortune estimée à 2,3 milliards d'euros, selon un classement établi fin 2006 par le quotidien El Mundo. La revue américaine Forbes lui attribuait une fortune de quelque 3 milliards d'euros. Deux fois marié et divorcé, il laisse derrière lui quatre enfants. L'un d'eux, Ignacio, actuellement vice-président de Prisa, devrait prendre sa succession à la tête du groupe.
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