Les trois chaînes italiennes privées contrôlées par le chef du gouvernement Silvio Berlusconi ont décidé de traiter la guerre en sujet mineur, à l'opposé de la télévision publique RAI qui consacre de nombreuses émissions au conflit en Irak. "Nous n'avons pas fait de grande variation à nos programmes", reconnaît le fils du président du Conseil italien, Pier Silvio Berlusconi, devenu en 2000 l'un des patrons de Mediaset, avec le titre de vice-président. Canale 5, Italia 1 et Retequattro, les trois chaînes hertziennes du groupe, se limitent à aborder la question du conflit dans leurs habituels journaux télévisés, a expliqué Pier Silvio Berlusconi cette semaine à Milan, lors de la présentation des résultats annuels de son groupe. Les éventuelles émissions spéciales sur la guerre sont reléguées en deuxième partie de soirée, a poursuivi le fils Berlusconi, qui dirige la partie purement télévisuelle du groupe. Mais un coup d'oeil aux programmes de ces derniers jours montre que, même en fin de soirée, les programmes d'information ou débats sur le conflit ne sont pas légions sur les chaînes de Mediaset. L'explication de ce choix -en contraste frappant avec la couverture de la RAI qui annonce avoir consacré 160 heures à la guerre sur ses trois chaînes depuis le début du conflit- est plus d'ordre financier que politique. "Nous jugeons qu'il y a un excès d'offre sur la guerre", a commenté Pier Silvio Berlusconi, suggérant ainsi que ce créneau est déjà amplement pris par la RAI et l'autre petite chaîne concurrente, La 7, propriété du groupe Telecom Italia, qui fait de l'information sa priorité. L'explication est surtout à chercher du côté de la publicité. "Certains de nos clients publicitaires nous disent de nous tenir loin de la guerre", a confié Giuliano Adreani, l'administrateur délégué de Mediaset et patron de sa puissante régie publicitaire Publitalia. Le responsable a ensuite rectifié le tir, assurant que "les programmes sont choisis de manière indépendante par rapport à la publicité". Mais l'expérience des grandes chaînes américaines lors des attentats du 11 septembre 2001 montre que ce type d'événement, et la couverture extensive qui en découle, se soldent par des pertes colossales en terme de recettes publicitaires. Ainsi le groupe de Rupert Murdoch, News Corp., qui détient aux Etats-Unis les chaînes Fox et Fox News a reconnu une perte de 100 millions de dollars pour la seule semaine du 11 septembre 2001, pour cause de suspension des spots publicitaires décidée par les chaînes pour laisser place au traitement de l'événement, ou bien en raison du retrait des annonceurs qui ne souhaitaient pas voir leurs publicités mêlés à des événements tragiques. Pour maintenir ses recettes publicitaires et ne pas effrayer ses clients annonceurs, mieux vaut donc s'abtenir de montrer trop la guerre. C'est le choix de Mediaset, qui se targue d'avoir enregistré une reprise des recettes publicitaires en mars, après deux mois difficiles. Les taux d'audience montrent la justesse du choix. L'émission de téléréalité "Grande Fratello", diffusée sur Canale 5, a dépassé -et de loin- en parts de marché (35% contre 23% en première partie de soirée) une émission de débat et d'actualité, "Porta a porta" sur RAI 1, consacrée à la guerre, au soir du premier jour de conflit. Parallèlement, Silvio Berlusconi, qui détient avec sa famille et à travers la holding Fininvest, 47,68% de Mediaset -il n'exerce plus de fonction officielle au sein de ces sociétés- peut être plutôt satisfait de voir ses chaînes ne consacrer qu'un temps limité à une coalition militaire "amie" -l'Italie ne participant pas directement au conflit-, qui rencontre plus de difficultés que prévu.
Rédaction
28 mars 2003
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