Avec "Culture, une affaire d'Etat" (diffusion le 5 novembre à 14H40), France 5 livre un passionnant documentaire sur la politique culturelle de la Cinquième République, tiraillée entre ses ambitions et ses moyens financiers, la préservation de la création et les assauts du marché. Jean-Michel Djian et Joël Calmettes ont décidé d'organiser leur film chronologiquement, d'André Malraux à Catherine Tasca. Au fil de nombreuses images d'archives et de témoignages, ils retracent en 90 minutes l'évolution d'un ministère créé ex nihilo pour Malraux, et devenu l'un des plus médiatiques du gouvernement au rythme des grandes "batailles" culturelles. Parmi ces dernières, on notera notamment le renvoi puis la réintégration de Henri Langlois de la Cinémathèque, la création du Centre Pompidou, l'épopée du Grand Louvre et de sa pyramide ou la mobilisation des artistes et de l'Etat en faveur de l'"exception culturelle". Si Djian et Calmettes font quelques "impasses" majeures - l'éclatement de l'ORTF ou la genèse mouvementée de l'Opéra-Bastille, par exemple - ils expliquent bien les ambiguïtés d'un ministère créé "non sur un projet mais sur un homme", Malraux, avant d'incarner la politique culturelle de la France face à l'Europe et au monde, et à ce titre intimement lié au pouvoir présidentiel. De fait, ils montrent comment le ministère s'est d'abord essentiellement consacré à la restauration et la sauvegarde du patrimoine, avant de devenir, avec François Mitterrand et Jack Lang, un outil revendiqué de "popularisation" de la culture, à travers par exemple la création de la Fête de la musique. Jusqu'aux années plus récentes - un peu "expédiées" par les deux auteurs - où le ministère de la Culture, épisodiquement doté du fameux 1% du budget de l'Etat, apparaît néanmoins de plus en plus figé dans le bureaucratisme et tiraillé entre la préservation de la création et les assauts du marché et des multinationales du divertissement. Mais le film est également l'occasion de découvertes ou de raviver quelques souvenirs. Djian et Calmettes rappellent ainsi que le "1% culturel" était à l'origine une revendication des communistes ou que le Centre Pompidou, que voulait stopper Valéry Giscard d'Estaing, a dû son "sauvetage" à Jacques Chirac, alors Premier ministre, qui avait mis sa démission dans la balance.
Rédaction
5 novembre 2002
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