Nicolas Sarkozy a annoncé mercredi la suppression de la publicité dès janvier à partir de 20H00 à la télévision publique, et proposé de mettre largement à contribution les fournisseurs internet et les opérateurs télécom pour financer cette réforme. Ce changement majeur dans l'audiovisuel public interviendra donc un an, presque jour pour jour, après l'annonce de ce projet de réforme par le président de la République, le 8 janvier dernier, à la stupéfaction générale. Mercredi, le chef de l'Etat a corrigé en plusieurs points le rapport remis le même jour par la commission présidée par le patron du groupe UMP à l'Assemblée, Jean-François Copé, qui planchait depuis quatre mois. M. Sarkozy veut accélérer la disparition de la publicité: progressive dès janvier 2009, définitive à partir du 1er décembre 2011, alors que la commission avançait les dates respectives de septembre 2009 et début 2012. "Je me dis +attention+, si on attend septembre 2009, c'est encore un an où le téléspectateur aura entendu dire qu'il allait se passer des choses et que ça allait changer et où il ne se passera rien", a-t-il justifié. Pour compenser la suppression des recettes publicitaires (estimées à 450 millions d'euros la première année), Nicolas Sarkozy veut taxer le chiffre d'affaires des opérateurs de téléphonie et d'internet à hauteur de 0,9% (plus que les 0,5% préconisés par la commission), soit 378 millions d'euros selon les estimations des professionnels. La Fédération française des télécoms, qui regroupe les opérateurs, a aussitôt qualifié cette taxe de "contre-productive" et d'"illégale". Les opérateurs "seront inéluctablement amenés à reporter tout ou partie de cette taxe sur la facture de leurs clients", a-t-elle prévenu. La proposition-surprise de M. Sarkozy de faire désormais nommer le président de France Télévisions par le gouvernement --et non plus par le Conseil supérieur de l'audiovisuel--, sauf véto d'une majorité qualifiée de parlementaires, a provoqué l'inquiétude de l'opposition.
Le président "porte un coup grave à l'indépendance des médias", ont estimé les députés PS, qui ont claqué la porte de la commission Copé début juin. Autres mécontents, les syndicats de France Télévisions, qui se déclarent "encore plus en colère" après le discours de Nicolas Sarkozy. "Toutes les mesures préconisées, tous les chiffres avancés sont remis en cause par Sarkozy. On ne sait plus où on va", a déclaré à l'AFP Jean-François Téaldi, membre de l'intersyndicale. M. Copé a estimé au contraire que l'essentiel des propositions de sa commission avaient été reprises, et il a assuré sur France 2 que la désignation du président de France Télévisions par le gouvernement "n'avait rien à voir avec (l'époque de) l'ORTF". "Il n'y a aucun risque de reprise en main", a aussi assuré la ministre de la Culture Christine Albanel. Les recettes publicitaires de toutes les chaînes privées feront l'objet, comme prévu par la commission, "d'un prélèvement nouveau de l'ordre de 3%" pour quelque 80 millions d'euros, a également indiqué M. Sarkozy. Il n'a pas évoqué l'indexation de la redevance (actuellement de 116 euros) sur l'inflation, préconisée par la commission. L'Elysée a précisé que le président était "toujours ouvert à cette hypothèse", mais que "la décision serait prise plus tard". Revenant sur les raisons de cette réforme qui bouleverse l'audiovisuel, Nicolas Sarkozy a souligné qu'"en supprimant la publicité, nous voulons donner à nos chaînes publiques les moyens d'une plus grande liberté".