"Le jeune loup" et "Le vieux lion": dans un documentaire très fouillé, diffusé ce soir à 20h55 et demain soir à 20h55 sur France 2, riche en témoignages et séquences d'archive, le service public s'attaque à la biographie de Jacques Chirac, signée par Patrick Rotman, déjà auteur d'un "François Mitterrand". De la Corrèze à l'Elysée, ce portrait en deux parties passe au crible 40 ans de vie politique de celui que Philippe Séguin nomme "le don Juan de la politique", pour épingler son appétit de pouvoir. Fils unique, énarque, militaire en Algérie, Chirac entre en 1962 au cabinet de Georges Pompidou, son "père affectif et spirituel". C'est ensuite, à partir de 1967, une carrière ministérielle, puis Matignon et la création d'un parti sur mesure, le RPR. Rotman décortique les doutes de cette figure alors montante, son besoin de s'entourer de parrains et conseillers, mais aussi ses manoeuvres pour contribuer à la défaite de Giscard face à Mitterrand en 1981, et pour faire de la mairie de Paris le fief lui permettant de s'imposer comme le dirigeant incontournable de la droite. La deuxième partie, "Le vieux lion", retrace la cohabitation avec Mitterrand et son florilège de chausse-trappes de part et d'autre, la "trahison" de Balladur vue par les chiraquiens, la présidentielle de 1995, la dissolution de 1997, sa réélection triomphale face à Jean-Marie Le Pen en 2002. "La démarche partisane ou pamphlétaire ne m'intéresse pas du tout", explique le réalisateur, qui a voulu "comprendre une personnalité et ses actions sur près d'un demi-siècle". Pour cela, il a fait appel à une dizaine de témoins, interviewés par l'ancien chef du service politique de l'AFP Pierre Favier et la journaliste politique du Figaro, Anne Fulda. Parmi eux figurent certains de ceux qui composèrent un temps sa garde rapprochée, comme Jacques Toubon, Charles Pasqua ou Philippe Séguin. Témoignages aussi d'Olivier Stirn et des socialistes Hubert Védrine, Pierre Moscovici, Jean-Louis Bianco ou Michel Rocard. Certains sont sévères. Raymond Barre voit en lui un "chevalier de l'opportunisme". "Jacques n'a pas à l'évidence de vision du monde un peu ferme", juge Michel Rocard, son ancien condisciple de l'Ena. Valéry Giscard d'Estaing, Lionel Jospin, Marie-France Garaud, Edouard Balladur et Jacques Chirac n'ont pas souhaité participer à ce documentaire. Selon les auteurs, "par son attitude intransigeante pendant vingt ans face à l'extrême droite, il a sauvé la droite du déshonneur". Au fil des séquences, celui qu'on a surnommé "bulldozer" et "hélicoptère" pour son activisme et son incapacité à rester en place, puis "serre-la-louche", "facho-Chirac" et "Jacques Chirouette", dévoile une personnalité de plus en plus complexe. Lui-même confirme, dans un enregistrement, s'être ménagé des jardins très secrets. "C'est un personnage aussi compliqué, complexe et secret que François Mitterrand, mais il s'y prend autrement pour se masquer", juge Patrick Rotman. L'Elysée a reçu la cassette du film, mais le président ne l'a pas visionnée, selon son entourage.
Rédaction
23 octobre 2006
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