Engagé dans son désendettement et sa tentative de reconquête des marchés financiers, Vivendi Universal (VU) a mis un terme aujourd'hui à la désastreuse campagne d'Italie de sa filiale Groupe Canal+ en cédant à News Corporation de Rupert Murdoch sa plate-forme italienne Telepiu. Sans mettre encore de point final à un dossier des plus feuilletonesque --le contrat définitif doit encore recevoir le feu vert des autorités de la concurrence-- il sonne néanmoins le glas des ambitions italiennes de Canal+. C'est en avril 2001 que le pdg de VU Jean-Marie Messier avait annoncé, dans l'euphorie d'alors, que Telepiu fusionnerait avec Stream, à l'avantage du premier. C'était oublier un peu vite l'anti-trust italien, guère convaincu par l'opération et qui s'apprêtait à opposer son veto au mariage annoncé. Qu'à cela ne tienne, VU avait alors proposé de racheter purement et simplement son concurrent. Bon prince, le groupe était même prêt à faire un certain nombre de concessions pour convaincre les autorités italiennes. Puis vint l'orage pour VU, avec les pertes 2001 historiques, l'endettement record, la stratégie brouillée, les critiques tous azimuts et l'action chahutée. Soudain, M. Messier n'avait plus guère envie d'ajouter aux pertes colossales de son bouquet italien celles, abyssales, de Stream. Les nouvelles exigences de l'anti-trust ont fait le reste, donnant à VU le prétexte de jeter l'éponge, en comptant sur la mort lente de Stream. Entre jouer lui aussi la montre, faire un procès à VU pour une éventuelle rupture de contrat ou racheter Telepiu, Murdoch a finalement choisi la troisième solution, déboursant pour cela 1,5 milliard d'euros. Pour Messier, qui déclarait il y a quelques semaines encore qu'il ne vendrait pas Telepiu "tout simplement parce qu'il n'y a pas d'acheteur", l'occasion est inespérée. L'impact de la vente sur le désendettement de son groupe sera de 1,2 milliard d'euros dans un premier temps, auxquels viendront s'ajouter ultérieurement 300 millions d'euros. Il se débarrasse de surcroît d'un boulet qui perdait chaque mois des dizaines de millions d'euros et grevait les comptes de Groupe Canal+. Pour autant, c'est aussi un constat d'échec à la fois pour le groupe de télévision et pour Jean-Marie Messier. "Les vrais problèmes de Canal+ ont commencé en 1997 quand le groupe a fusionné avec Nethold et a récupéré l'Italie", estime un bon connaisseur du dossier. "Ils ont payé trop cher un boîte très mal gérée qui n'avait que des dettes. A l'époque, tout le monde était enthousiaste, à commencer par Messier" (qui contrôlait déjà Canal+, ndlr), ajoute cette source. Avant d'être écartés du groupe en avril dernier, Pierre Lescure et son directeur général Denis Olivennes avaient fini par admettre, dans un message aux salariés de Canal+, qu'il eût été plus prudent d'abandonner l'Italie mais que Messier s'y était opposé. "S'il fallait couper dans les investissements, c'est-à-dire privilégier le cash d'aujourd'hui sur la croissance future, il était possible de vendre l'Italie. Cela n'a pas été le choix stratégique fait par Vivendi Universal", écrivaient-ils alors. "C'est tout le pari ambitieux de l'édification d'un groupe européen de télévision payante". Une ambition sévèrement rognée aujourd'hui, même si Canal+ assure dans son communiqué que "cette opération (lui) permettra de concentrer ses investissements" sur les marchés de télévision à péage français (qui stagne), espagnol (dans lequel VU n'a qu'une participation de 23%), polonais (encore déficitaire), dans le Benelux et dans les pays scandinaves.
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