Voltaire, sous les traits de Claude Rich, a repris possession de son château de Ferney (Ain) le temps du tournage d'un film de la télévision suisse consacré à "l'affaire Calas", qui avait donné au philosophe l'occasion de pourfendre le fanatisme religieux. Le 10 mars 1762, Jean Calas, un protestant de Toulouse, était exécuté dans d'horribles tortures après avoir été convaincu du meurtre de son fils à qui il aurait ainsi voulu interdire de se convertir au catholicisme. Révolté par ce jugement expéditif dans une Toulouse fanatiquement catholique, Voltaire, alors au sommet de sa gloire à 68 ans, remue l'Europe entière avec un "Traité sur la tolérance". Il obtient trois ans plus tard la réhabilitation de la famille Calas. Dans "Voltaire et l'affaire Calas" qu'elle diffuse ce soir, la Télévision suisse romande (TSR) revient sur ces événements qui ont fait de Voltaire (1694-1778) le père des intellectuels engagés. Le téléfilm a été produit avec la participation de France 2 et Arte mais la date de sa diffusion en France n'est pas encore arrêtée. Le tournage s'est déroulé à l'automne dernier dans le château construit et habité par l'écrivain pendant les 20 dernières années de sa vie à Ferney (aujourd'hui Ferney-Voltaire), aux portes de Genève mais en terre française. Le "Patriarche de Ferney" y a "cultivé son jardin", développant l'agriculture et l'industrie dans un bourg jadis misérable. En cas de besoin, la proximité de Genève permettait de filer rapidement à l'étranger à l'écrivain exilé de Paris par ordre de Louis XV pour ses oeuvres subversives. C'est semble-t-il la première fois qu'un film sur Voltaire est tourné dans le château. La demeure n'est en effet devenue un monument national qu'en 1999 après être restée entre des mains privées depuis l'époque de Voltaire. Durant les scènes tournées en extérieur, les acteurs ont dû faire abstraction des décollages et atterrissages de l'aéroport de Genève, tout proche, et tenter malgré tout de se replonger dans l'époque. Claude Rich, 78 ans, incarne un Voltaire d'abord cynique et fatigué, qui rechigne à porter secours aux Calas et aux protestants en général. Il leur reproche notamment de condamner ses pièces de théâtre. Mais une fois convaincu de l'iniquité du jugement, le philosophe et son double se réveillent lorsqu'il s'agit de dépeindre avec fougue le calvaire enduré par Jean Calas. Il en profite pour infliger un coup de patte aux religions "qui se valent toutes en cruauté". Le cinéaste suisse Francis Reusser établit le lien entre l'affaire Calas, avènement de "l'opinion publique" en politique, et la Révolution française, qui suivra moins de 30 ans plus tard. Mais le message voltairien reste d'actualité, selon lui. "Du fondamentalisme chrétien renaissant à l'ouest à son pendant islamique à l'est et au sud, notre époque n'est pas à l'abri d'un renouveau d'intolérance et de rejet de l'autre", observe-t-il. Reusser a rassemblé pour son film 300 figurants en costume, mais décors et acteurs ne sont pas toujours convaincants. C'est, selon le réalisateur, la première fois depuis les temps de l'ex-ORTF (monopole de la radio télévision publique française) en 1963 qu'un film est tourné sur l'affaire Calas.
Rédaction
4 avril 2007
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