Le célèbre site de musique en ligne Napster a annoncé vendredi qu'il allait installer un filtre sur son site pour bloquer l'échange de chansons protégées par les droits d'auteur, dans un ultime effort pour éviter la fermeture préconisée par la justice américaine. Adversaires et défenseurs de Napster ont croisé le fer lors d'une audience de plus de deux heures à San Francisco devant la juge fédérale Marylin Hall Patel, qui n'a pas immédiatement rendu de décision. Selon les observateurs, celle-ci devrait être annoncée d'ici une semaine. Sans convaincre l'industrie du disque, Napster, accusé de violer les droits d'auteur en permettant l'échange gratuit de fichiers de musique sur l'internet, a créé la surprise en annonçant qu'il allait installer dès ce week-end un filtre sur son site pour bloquer l'échange de chansons protégées par les droits d'auteur. Les ingénieurs de Napster travaillent "nuit et jour" sur ce filtre, a déclaré David Boies. Cette technique doit permettre au site de détecter les chansons protégées par les droits d'auteur qui transitent par ses ordinateurs et d'en bloquer l'échange. L'avocat de Napster a demandé en contrepartie aux maisons de disque de lui fournir des listes des artistes et titres de chansons protégées. Réticente, l'industrie du disque a répondu qu'il était de la responsabilité de Napster et non des éditeurs d'identifier et de bloquer les échanges de musique violant la propriété intellectuelle. "Napster a obligation de surveiller lui-même son système," a déclaré un des avocats de l'industrie du disque, Russell Frackman. Les maisons de disques ne sont pas obligées "de dépenser énormément de temps et d'argent" pour donner à Napster ces listes, a-t-il ajouté. Les quelque 60 millions d'utilisateurs de Napster, un site créé il y a moins de deux ans, peuvent pour l'instant s'échanger gratuitement de la musique sans aucune restriction. Il suffit d'indiquer le titre recherché. Le logiciel de Napster regarde si ce titre est disponible sur l'ordinateur d'un autre utilisateur et le transfère alors vers celui du demandeur. En première instance, le 26 juillet 2000, le juge Patel avait ordonné à Napster de stopper tous les échanges de musique protégés par les droits d'auteur. Cette décision est bloquée depuis par une procédure d'appel engagée par Napster. Le 12 février, la Cour d'appel de San Francisco a cependant abondé dans le sens du juge Patel en estimant que le célèbre site californien "encourage ses utilisateurs à violer les droits d'auteur des maisons de disques". Elle a demandé toutefois au juge de revoir sa copie, estimant que les maisons de disques devaient informer Napster des titres protégés par les droits d'auteur échangés sur son site, afin qu'il puisse en bloquer l'échange. Les chansons échangées sur le site sont éditées à près de 90% par l'industrie du disque et relèvent donc de la propriété intellectuelle. Napster a reconnu qu'il allait devoir limiter les échanges de musique sur son site pour respecter les droits d'auteur, faute de quoi il court le risque d'être fermé par la justice. Pour tenter de sortir de l'impasse, Napster essaie, en vain jusqu'à présent, de négocier un règlement à l'amiable, qui mettrait fin à un procès de plus en plus suicidaire. Le site propose aux grandes maisons de disques de payer 200 millions de dollars de droits d'auteur par an pendant cinq ans et d'instaurer parallèlement un système d'abonnement pour les utilisateurs. Mais à l'exception de Bertelsmann Music (BMG), qui s'est allié à l'automne 2000 à Napster, toutes les majors font pour l'instant la sourde oreille.
Rédaction
3 mars 2001
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